Texte du frère Jean:
Ce fut le 8 juillet de l’an de grâce 2007.
Parves, un petit village gaulois de 321 âmes, situé dans le Bas-Bugey, à quelques encablures de Belley, département de l’Ain, abrite onze sociétés, soit pratiquement une par cent habitants. Et c’est sans parler de notre bonne Eglise, qui doit bien compter ses propres fidèles dans le village.
Or voici que l’une de ces sociétés, celle dite “Comité des Fêtes”, se met en travail de préparer une nouvelle fois depuis 2003 sa « Fête des Métiers Artisanaux ». C’est ainsi presque un quart du village qui se voit aménagé pour recevoir cordiers, potiers, sculpteurs sur bois, graveurs sur pierre, tailleurs d’icelle, graveurs de corne, joailliers, artisans du cuir, de la fine boucle maillée dont on fait les plus doux hauberts et bien d’autres métiers dont ceux de bouche sont les préférés de votre serviteur.
Mus par cet esprit que leur insuffle une vocation que seule celle d’un bon Frère Franciscain pourrait concurrencer, nobles Dames et Chevaliers d’Avalon bravèrent un ciel que le soleil avait déserté depuis bien des semaines déjà. Sur place, rien que d’habituel, c’est-à-dire cette belle perfection d’un camp qui, bien que réduit, constitua la pièce maîtresse de la fête.
L’association des Accordéonistes démentirait bien sûr à son profit cette affirmation. Nous consentirions à lui donner raison pour le bref instant où messire Pierre-Alain et sa Dame – ô, que j’aille à confesse ! – interprétèrent publiquement un « Port d’Amsterdam » aussi mémorable qu’homérique.
Tout allait donc pour le mieux dans ce monde moyenâgeux quand, vers la tombée du soir, sans doute crevés par les nombreuses flèches décochées trop haut en direction du ciel par notre Captal Thierry et ses émules, tous les nuages se mirent à fuir.
Et nous ne pouvions fuir.
Et là, ce fut comme il est dit dans les écritures. Une parfaite reconstitution du déluge, avec ses eaux, ses vents, ses ombres grandissantes dans la nuit, ses zébrures de feu dans le ciel, bruyamment ponctuées par un tonnerre que même la montée du même nom (In Vino Veritas) s’en trouverait épouvantée.
Nous le fûmes en démontant les tentes.
Certains, je le sais, mirent cela sur le compte de l’évocation chantée de ces vigoureux marins se mouchant dans les étoiles, incitant ces dernières à vomir toute l’eau de leur ciel. D’autres penchèrent pour la punition infligée à un pauvre moine qui parvint bien malgré lui à mystifier un quidam par le simple port de ses sandales dans lesquelles ses pieds étaient nus.
Moi, je crois que ce fut une bénédiction : ce déluge nous réunit tous sous un couvert près de l’école, et être ensemble nous va bien. Il fit par ailleurs rentrer chez eux toutes bonnes gens qui ainsi n’eurent point le cœur fendu de nous voir les quitter pour nos propres cieux, pas toujours plus cléments, après une heureuse journée passée à se souvenir du temps… passé.